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Si on me proposait de revenir en arrière, rien ne serait pareil

Mon histoire commence avec la rencontre de Timothée. Pendant deux années, nous sommes restés ensemble, avec des hauts et des bas comme pour tous les couples.

Nous faisions l’amour, en prenant toutes les précautions requises (j’étais sous pilule). Mais notre vie a soudainement viré au cauchemar. Au moins pour moi, car pour mon partenaire, je ne sais pas, il m’est difficile de discerner ses sentiments.

Au mois de mai, mes règles ne sont pas tombées. Au début, je ne m’inquiétais pas, j’attendais…

Tous les matins, j’étais prise de nausées. J’ai tout de suite su que quelqu’un avait pris place dans mon corps. C’était ma vie, ou plutôt notre vie à lui et à moi.

Au bout de 3 semaines, j’ai fait un test de grossesse. Je savais déjà qu’il serait positif puisque j’étais sûre d’abriter quelqu’un. Je le sentais et je me sentais quelque peu changée.

Le test fut positif : l’effondrement ! Je pleurais, je n’arrêtais pas de pleurer.

Pressions de l’entourage

Ma mère a pris toutes les dispositions. Pour elle, c’était évident, c’était l’avortement !!

Le soir même, je téléphonais à Timothée, qui disait aussi qu’il était inimaginable d’avoir un enfant maintenant. Moi, je ne savais plus, je me laissais guider. J’étais devenue faible, me sentais seule et complètement abandonnée. Mon avis, tout le monde s’en foutait alors que c’était à moi de décider.

Une IVG ne peut se faire sans échographie, ce jour là fut aussi atroce que les autres. Je surnommais l’enfant que je vis sur un écran Julie : pour moi, c’était une fille.

Ensuite, il y eut la visite chez le gynéco, la conseillère conjugale, puis le mauvais jour.

Je suis entrée à l’hôpital de très bonne heure en demandant sans cesse à Tim si sa décision avait été bien prise : « Oui, il faut le faire » répétait-il.

Vers 10h00, on vint me chercher pour m’emmener dans une salle (d’accouchement). On a mis mes pieds dans des étriers et badigeonné mon sexe de bétadine. Heureusement que Tim a pu venir avec moi dans la salle.

Je fus prête, je pleurais, je pleurais, ça coulait et rien ne s’arrêtait. On m’enfonça une longue aiguille contenant du produit anesthésique, la douleur me prit jusqu’au milieu du ventre ; j’avais mal, une douleur atroce. Puis ma petite Julie, ma vie fut aspirée et ramenée dans un bocal, je suivais son parcours à travers un tube transparent. J’étais vide, j’avais un ventre plat, je l’avais imaginé grossi auparavant.

Regrets

Je me suis excusée auprès d’elle et lui ai expliqué les raisons de cet acte puisque des fois, et même tous les soirs, je lui parlais en caressant mon ventre.

Cet acte, je l’ai fait avec beaucoup de regrets et aujourd’hui encore, si on me proposait de revenir en arrière, rien ne serait pareil. Je l’aurais mise au monde que ça plaise ou non, même s’il avait fallu que je l’élève seule.

Une chose est sûre, c’est que toi, Julie, je ne t’oublie pas et jamais je ne t’oublierai.

On a l’impression que faire un tel acte peut être sans contrainte ni difficulté et pourtant c’est faux. Aujourd’hui j’en souffre encore, plus d’un an après.

J’en ai des malaises, des malaises à n’en plus finir. J’ai des cauchemars, parfois si horribles que je ne peux les expliquer, tellement ils sont atroces à mes yeux. Et ma vie sexuelle ? Je n’en ai plus eu pendant bien longtemps. Disons que je faisais l’amour en me disant : « vivement qu’il prenne son pied, pourvu qu’il se retire in extremis ». Car j’ai peur, peur que le cauchemar recommence et peur que l’on me dise que j’ai un enfant mais qu’il faut me l’enlever. Non, plus jamais ça !!! Ça fait trop de mal.

Il faut dire aussi que lorsque ça m’est arrivé, je n’étais plus moi-même, une autre personne prenait les décisions à ma place. Je n’arrivais plus à réagir, poussée de tous côtés à faire l’irréparable.

Il faut que l’on m’aide pour en sortir. Je ne sais pas exprimer mes sentiments, mais je sais que j’ai mal, je souffre

 Marianne

Si on me proposait de revenir en arrière, rien ne serait pareil