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"Pourquoi ne m'en as-tu pas parlé ?"

« J’étais scié. Je m’arrête net, un peu glacé. En l’espace d’une seconde, j’apprenais qu’elle avait été enceinte de moi, la vie et la mort d’un enfant possible… Moi, qui en ai déjà, je sais qu’un enfant existe bien avant sa naissance et que c’est une richesse infinie. « Pourquoi tu ne l’as pas gardé ? » a été ma première question. (…)

Je n’ai même pas posé la deuxième question qui me venait à l’esprit : « Pourquoi ne m’en as-tu pas parlé ? » (…). Aborder le sujet, c’était rendre cet embryon plus présent, envisager qu’il fût possible de le garder. Moi, jamais je ne lui aurais demandé d’avorter. Elle a préféré que ça reste sa décision. Je la comprenais et je lui en voulais en même temps. Je me sentais agressé. (…). Moi, en me privant de parole, de décision, de l’information même, elle m’avait nié. (…) En taisant cet avortement, elle m’avait rendu impotent, impuissant.(…) Je suis parti vers cinq heures du matin. J’ai raconté ça au chauffeur de taxi. Il fallait que j’en parle. (…). J’ai trouvé une pizzeria ouverte. Je pensais à cette option de vie qui n’avait pas été prise. »

Florian, Marie-Claire 574, juin 2000

"Pourquoi ne m'en as-tu pas parlé ?"